dimanche 10 décembre 2006

La Terreur du Sergent

Je devais avoir 6 ou 8 ans quand un de mes oncles d'à peine 10 ans mon aîné, m'offre pour un Noël une reliure intégrale (le jargon, je l'ai appris plus tard) du Journal Pilote. Une couverture terrible (ou une terrible couverture ?) de Druillet orne le 1er plat (le jargon… cf. plus haut !) ; le contenu des magazines va me subjuguer (pour le vocabulaire, c'est un peu comme les termes techniques des métiers du livre…), je me souviens d'une couverture de Moebius-Giraud, de la Déviation du même, de plein d'autres choses qui vont un peu me changer des Journaux de Spirou, Tintin ou autres Mickey et Pif Gadget que je lisais à cet âge là... Mais surtout et toujours de pages qui vont me hanter jusqu'au bout de l'Eternité sans Fin, des pages étranges, avec des couleurs vives, des bulles énormes, des textes tordus du moins pas aussi nets que dans Tintin et Milou, ne parlons même pas des bulels elles-même ("phylactères" est-ce mieux ?) et d'un étrange petit bonhomme habillé en soldat et à l'apparence sèche d'un insecte (cancrelat ; pince-oreille ?) qui hurle si fort que le son de sa voix sort du papier imprimé, qui hurle toujours et encore après un énorme soldat au visage rond et gentil mais toujours au garde à vous... Je ne prétendrais pas y avoir compirs grand chose à cette époque, et certainement rien d'ailleurs, surtout du trouble : on joue encore au soldat quand on est enfant !
Mais le fait est que le souvenir est très fortement ancré dans ma mémoire. Rarement ravivé, et du moins très mal par les rares albums existants juque là, dont un en noir & blanc. Souvenirs qui remontent pourtant à ma mémoire, de plein fouet, grâce à la chance absolue que j'ai eue de faire mon service militaire, et même si cela fut dans un régiment d'artillerie nucléaire (si, si cela existait bien !) : ce stage non rémunéré de longue durée m'aura permis de perdre mon temps, bien évidemment, mais aussi de mieux saisir la force de Sergent Laterreur. La force de la bêtise toute molle que l'on palpe du doigt devrais-je dire… Loué soit le Seigneur : ce sentiment étrange et indicible est revenu en feuilletant les premières pages de ce magnifique livre édité par L'Association ; je vais le lire avec plaisir, et curiosité, cela est certain. Je ne sais pas si cela est bien, mais avoir en si peu de temps retrouvé cette étrange sensation est déjà un appel en soi !