vendredi 24 janvier 2014

> Mickey… M-I-C-K-E-Y : la madeleine, c'est Donald !

Je me suis finalement décidé à rechercher ce fameux premier numéro du Journal de Mickey que j'ai lu enfant…
Si j'ai conservé quasiment toutes les revues et bandes dessinées qui m'ont été offertes depuis mon enfance, incluant celles de mon père dont les journaux de Spirou ou Tintin décennie 50 du XXe siècle, quelques petites choses sont passées  à travers les mailles du filet : en particulier mes journaux de Mickey ou Pif Gadget, mes Pif Poche et autres poches, Alan Ford du grand Magnus (forcément) etc.
J'avais toujours conservé dans un petit coin de ma mémoire le visuel de la couverture de ce fameux premier numéro de Mickey : il ne doit pas y en avoir tant que cela avec Popop et Donald en dominante rouge ?…
Comme il m'arrive parfois de le me réveiller tôt la nuit, une de celles-ci m'a permis de faire quelques recoupements rapides entre la couverture que j'avais en mémoire, les dates possibles… : en particulier grâce à cet extraordinaire site BD OUBLIÉES et divers autres sites…

Je l'ai trouvé (relativement cher) sur un site internet sur lequel je ne vais jamais, c'est donc un ami qui l'a commandé pour moi.
Je ne sais plus trop quel librairie vendrait des numéros de magazines BD hors Spirou et Tintin (et au numéro ce doit être de plus en plus rare : et plus aléatoire encore de tomber sur le numéro que l'on recherche ) ?
Ce genre de libraires vendent sur la toile, qui se tisse et encercle de plus en plus les librairies physiques ayant encore pignon sur rue…
Mon ami me l'a apporté vite : état pas terrible, prix élevé pour ce type de numéro mais le fait d'avoir "à nouveau" ce fameux premier numéro de Mickey qui est en fait la première bande dessinée que j'ai lue n'a pas de prix…

Le Journal de Mickey #978 du 14 mars 1971

La fameuse madeleine(1) fonctionne bien en général.
Mais peut aussi nous ramener à la réalité !
Et le souvenir emplit de nostalgie est souvent inversement proportionnel à la qualité réelle du contenu que l'on vaillamment cherché et fini par trouver…
Cela se vérifie : j'ai bouclé une faille spatio-temporelle (dans la mesure où j'ai failli : à ne pas savoir conserver ce numéro, que j'ai peut-être prêté et qui ne m'a jamais été rendu d'ailleurs : un grand classique), mais il n'est pas toujours bon d'être un looper.

Je suis heureux d'avoir trouvé ce numéro, surtout dans le prolongement immédiat du moment où je me suis décidé à en chercher les références : une quête trop longue engendre trop d'attente, trop souvent très décevante au moment où l'on trouve l'objet de sa quête.
Ce n'est pas le Graal tout de même…
D'ailleurs je me demande si la quête en elle-même n'est pas plus importante que l'objet de celle-ci : elle nous porte et nous oriente.
Pour revenir à ce numéro 978  du Journal de Mickey : objectivement, pour ce qui est du contenu, donc des histoires de bande dessinée à l'intérieur, ce ne sont pas vraiment des chef-d'œuvres !

Heureusement que je suis passé à Spirou, Tintin, Pif gadget tout en lisant aussi Le Journal de Mickey… cela permettait de ré-équilibrer mes lectures de bandes dessinées et d'ouvrir le champ de vision…

Cela dit, l'univers des canards : Donald, ses neveux et Picsou et les autres, est celui qui m'a toujours énormément plu.
Donald est mon personnage préféré dans l'univers disneyen : le seul personnage complexe et véritablement "humain"…
Tout ce qui fait l'Humain est concentré en lui : il n'est pas habité par cette espèces de niaiserie du héros parfait que sont devenus trop de personnages de bande dessinée au fil du temps, Mickey en particulier : avec ce côté trop fortiche, trop parfait qui correspond à cette idée trop répandue de nos jours finalement du politiquement correct, est assommant.
Trop fade. Voire fadasse.
Donald a vraiment du caractère et, parfois, sale caractère (en passant : la meilleure collection éditée par Glénat dans les années 80, qui n'a pas marché, comme par hasard) : c'est en cela qu'il est intéressant car réellement humain.
Il vit. Il respire. Très, trop fort parfois car il fulmine. Il enrage. Il n'aime pas l'injustice qui l'entoure. Il s'emporte mais finit toujours par retrouver son calme. Il perd parfois, a priori, mais il gagne plus en retour au final…
Certes Donald a des aspérités, mais Donald c'est la Vie.

Tout simplement.
Dans ce qu'elle doit/devrait être : avec des hauts et des bas. Du mouvement et du rythme.

Donald est finalement, véritablement, indéniablement gentil. Il suffit de lire au-delà de la surface et du vernis de  Mickey pour s'en rendre compte.
Naïf car il croit encore et toujours en lui, en Picsou, en tant de choses, et peut-être en sa chance, son destin qui ne sont pas si souvent présents…
Il porte des rêves et des espoirs, le principal étant l'amour de Daisy.
Il voudrait avoir de l'argent, mais pas comme Picsou pour le stocker et en amasser toujours plus, mais pour le dépenser et faire plaisir autour de lui, réaliser des choses, les matérialiser. Ce qui est le plus important car faire est toujours plus important que parler des choses que l'on va faire et que l'on ne fait jamais.
Donald est un Utopiste.

Mickey est bien trop gentil, trop lisse, il ne fait jamais de vagues : le héros trop parfait (là où Donald est perfectible).
C'est inquiètant. Voire suspect.
Le monde de Disney est devenu trop moralisateur (soit-dit en passant, j'en connais pas mal d'autres dans la bande dessinée qui le sont) : glissant vers la formule de Jean Yanne sans le fond ou le décalage :  Tout le monde il est beau, tout le monde il est gentil
Un univers bien plus manichéen que celui des canards.

Un monde en voie de pasteurisation, et que cela prenne, tout au moins en France, serait vraiment paradoxal…

Alors, oui, vive Donald Duck, et toute sa famille de canards qui ne sont pas boiteux du tout !

Que les électrons libres continuent à remuer un peu partout tels ces haricots sauteurs qu'offrait un ancien numéro de Pif Gadget !!!…

Pop… pop… pop… Popop !!!



L'œuf du mystère, planche originale
© Ted Benoit


(1) «Et tout d'un coup le souvenir m'est apparu. Ce goût, c'était celui du petit morceau de madeleine que le dimanche matin à Combray (parce que ce jour-là je ne sortais pas avant l'heure de la messe), quand j'allais lui dire bonjour dans sa chambre, ma tante Léonie m'offrait après l'avoir trempé dans son infusion de thé ou de tilleul. La vue de la petite madeleine ne m'avait rien rappelé avant que je n'y eusse goûté... Mais, quand d'un passé ancien rien ne subsiste, après la mort des êtres, après la destruction des choses, seules, plus frêles mais plus vivaces, plus immatérielles, plus persistantes, plus fidèles, l'odeur et la saveur restent encore longtemps, comme des âmes, à se rappeler, à attendre, à espérer, sur la ruine de tout le reste, à porter sans fléchir, sur leur goutelette presque impalpable, l'édifice immense du souvenir.»
Marcel Proust, Du côté de chez Swann À la recherche du temps perdu 1

mercredi 22 janvier 2014

> Yves Chaland et Luc Cornillon c'est Captivant !

Captivant est sorti sous forme de livre en 1979 : comme le recueil d'une revue illustrée sortie des archives personnelles des deux auteurs, Yves Chaland et Luc Cornillon…
Il est amusant de constater différentes versions et quelques modifications entre les diverses publications et éditions de certaines histoires : tant au niveau du choix de mise en couleurs et/ou valeurs de couleurs, que dans la forme. 
Prenons une histoire de Noël 1954 réalisée par le seul Chaland : Le Noël de Lucia.
Paradoxe spatio-temporel, la première publication de cette histoire de trois pages,  à laquelle se greffe une fiche bricolage de bas de page, se fait dans le numéro 36 de la revue mensuelle Metal Hurlant du 1er décembre 1978, dont voici la couverture :

Métal Hurlant n° 36 - décembre 1978 - couverture

Cette première version a une mise en couleurs très différente de celle à laquelle les lecteurs du livre ont pu être habitués...
Le graphisme du titre Le noël de Lucia pourrait laisser à penser que Chaland avait vu le travail de Swarte sur les titres de certaines de ses histoires de Jopo de Pojo ?…

Le Noël de Lucia, pl. 1 in Metal Hurlant n° 36
Le Noël de Lucia, pl. 2 in Metal Hurlant n° 36
Le Noël de Lucia, pl. 3 in Metal Hurlant n° 36

Une trèszoulie mise en couleurs avec, justement, plein de couleurs. 
L'histoire complète court sur trois pages, et, la fin de l'histoire en elle-même est sur un strip en haut de la page ; le bas de la page étant occupé par un fiche bricolage pour construire sa propre crèche électrique de Noël…
La petite chose à remarquer dès à présent est la petite scène de cul (c'est le Noël de Lucia !) en haut à gauche, avec sa mise en couleurs toute en chaleur, heu… pardon, couleurs chaude : c'est la passion !…

Le premier livre compilant les histoires disparates publiées dans Métal Hurlant par les sieurs Chaland et Cornillon sort donc en 1979 : Captivant. 
Chez les Humanoides Associés.
Une belle couverture très intrigante et pleine de mystère n'est-elle pas ?
Un 4ème plat à damiers, plutôt option micro-damiers avec du jaune et du vert histoire de faire résonance avec la mythique Collection du Lombard...
La photo des auteurs était systématique dans la célèbre Collection Pied Jaloux des Humanoïdes Associés (je ne pense pas qu'aucune autre Maison d'Edition de bande dessinée n'ait jamais porté un nom aussi fort et conceptuel) : cela était une excellente idée, permettant tout simplement au lecteur de mettre un visage sur les auteurs dont il dévorait les livres.
Et ainsi de continuer à rêvasser  à de magnifiques aventures, dont celle lui permettant de côtoyer ces artistes aux parfums d'encens ramenés des rivages orientaux d'où ils tiraient leurs œuvres majestueuses et improbables…
Je m'égare : cela servait surtout à reconnaître lesdits auteurs quand on les attendait alors qu'ils arrivaient largement en retard aux séances de signatures organisées pour promouvoir la vente des livres…
Notons au passage je magnifique jeu de mot retenu pour cette collection. Pieds Jaloux…
Allons, quoi, c'est facile…
On dirait le titre d'une chanson de Gotainer : hé oui, Monsieur, on a des Lettres où l'on n'en a pas !…

Il est certain que Collection Pied Jacon, ça ne claque pas le même façon.
C'est un concept beaucoup plus récent utilisé en marketing pour la bande dessinée… 

Captivant - couverture
Première édition Collection Pied Jaloux 1979
Captivant - 4e plat
Edition Originale Collection Pied Jaloux 1979

Dans le livre / recueil, l'histoire de Lucia fait partie du numéro 381 de Captivant en date du 2 aôut 1954 : un numéro Spécial Noël, évidemment... 
Aux côtés d'une belle histoire de Noël, elle aussi très morale, de Cornillon, avec le grand Sam Kentucky :  qui n'a rien à envier au Red Ryder de Fred Harman, qui passaient dans les pages de Spirou…
Il est entendu que Captivant paraissait le jeudi : le passage au mercredi comme RTT pour les écolier n'est arrivé que dans les années soixante-dix (septantes) en France. 
Cet avantage social pour les scolaires vient d'ailleurs d'être raboté sérieusement depuis la rentrée scolaire 2013 : encore un acquis social qui est éliminé de l'échiquier. 
Comme il n'y a quasiment plus de revue de bande dessinée pour les enfants…
Les illustrés de bande dessinée sortaient donc tous le jour de repos des enfants : c'était une drôle de coïncidence et une sacrée chance de ne pas s'ennuyer au lieu d'aller jouer au foot ou faire ses devoirs…
C'est la TV qui a chamboulé tout ça : putain de télé…

Captivant numéro 381 - couverture
in Captivant recueil ; 1979

L'histoire de Lucia voit sa mise en couleurs modifiée pour cette publication dans ce "recueil" Captivant : on passe en bichromie et la joyeuse petite frise étoilée présente sur les pages dans Métal Hurlant a disparu…
Le papier est de type couché mat (ou satimat ? ou couché-quelque-chose : pas la peine de jouer à l'esthète sûr de tout). 

Le Noël de Lucia pl. 1
in Captivant 1ère édition ; 1979
Le Noël de Lucia pl. 2
in Captivant 1ère édition ; 1979
Le Noël de Lucia pl. 3
in Captivant 1ère édition ; 1979

La petite scène de cul (c'est toujours le Noël de Lucia !) en haut à gauche, est bien là…
Avec sa mise en couleurs à dominante rouge : les corps s'entremêlent toujours dans une pirouette kamasutresque…

Le livre est épuisé dans les années quatre-vingt et sa valeur monte… monte… monte.
Les Humanoïdes Associés ont lancé la Collection Les Yeux de la Tête (tout un programme) en 1983 avec des titres comme La nuit porte conseil de Dodo et Ben Radis avec une jaquette dite "feu de plancher"© posée sur la toile noire de cette histoire à ambiance polar, ou Ça roule de Jano, hommage au Dinky Toys…
La ré-édition de Captivant prendra sa place dans cette belle collection aux côtés d'auteurs comme Ted Benoit avec Bingo Bongo et son combo congolais (1987) ou, plus tard, son ami François Avril avec Soir de Paris (1989 ; scén. Petit-Roulet)…
Changement de programme du fait de la nouvelle collection : le collectionneur / lecteur aura droit à un livre avec un magnifique dos rouge toilé afin de mieux rappeler les livres d'antan et la percaline.
Le papier est un papier offset crème ou ivoire suivant l'angle du soleil ou l'avis de chacun : quoi qu'il en soit, le rendu des couleurs est bien différent et peut-être mieux : plus dans l'esprit des histoires…
Pour le reste c'est toujours un recueil de Captivant par Chaland ET Cornillon : depuis 2002 tout le monde sait que l'on ne change pas une équipe qui gagne !…
Le logo de la Collection apparaît au 4e plat passe bien le temps et reste plutôt pas mal maintenant que je le revois.
Apparition des fameux codes barres qui commencent à se généraliser depuis les années 80.
Les noms des auteurs sont moins affirmés et mis en avant que dans la première édition : plus discret…

Captivant - couverture
Deuxième édition ; Collection Les Yeux de Têtes 1987
Captivant - 4e plat
Deuxième édition ; Collection Les Yeux de Têtes 1987
Captivant numéro 381 - couverture
in Captivant Deuxième édition ; 1987
Captivant numéro 381 Pl. 1
in Captivant Deuxième édition ; 1987
Captivant numéro 381 Pl. 2
in Captivant Deuxième édition ; 1987
Captivant numéro 381 Pl.3
in Captivant Deuxième édition ; 1987

Mais, mais… ??…
Que se passe-t-il ?…
Nous devrions retrouver notre fameuse petite scène de cul…
Elle a disparu : tout simplement. Incroyable.
Pas au coin de ma rue, mais au coin de la page…
Disparu.
Incredible de by jove !!!
Regardez en haut, la case à gauche…
Case noire avec quelques bulles marquant l'effort du couple, ou la suggestion et l'imagination doivent prendre le pas sur la première version si explicite.
Ou alors, explication beaucoup plus rationnelle (comme quoi il faut parfois réfléchir dans la vie), il y a eut un court circuit lors de l'allumage de la fameuse crèche électrique : les plombs ont sauté entre les deux versions ?…
Il est vrai qu'à cette époque nous pouvions encore être en 110v, et le passage au 220v, ou un mauvais contact …
Que sais-je ?…
Oui : ce doit être plutôt cela la bonne explication…

Je me demande toujours s'il s'agit d'un choix artistique autrement nommé "ellipse" pour faire bien, ou alors une forme d'auto-censure ou bien encore le résultat d'un échange entre l'éditeur et l'auteur ?…
Il faudrait que je me renseigne vraiment un jour, et que j'arrête de me contenter de l'histoire de la crèche qui ferait sauter les plombs… tous les plombs.

Mais je le dis tout net et sans détour : c'est tout simplement fou !…

Deuxième édition épuisée et surtout souvent soldée : les fameux "retours" qui repassaient en circuit solde dans les années 90.
Il faut attendre 1996 & 1997 et les éditions des différents livres de Chaland sous forme d'intégrale (quatre volumes) pour retrouver Captivant dans le tome 3 avec une chronologie étrange car Bob Memory est une histoire antérieure à Bob Fish si je ne m'abuse, comme disait ce bon vieux docteur :

Chaland, Intégrale vol. 3 - couverture (jaquette)
Les Humanoides Associés ; 1997

Les premières intégrales ont des jaquettes sur les couvertures et sont d'un format agréable : 24,5 x 30,7 cm.
Les intégrales re-sortiront en 2003, format un peu agrandi en hauteur et sans jaquette…
De légères modifications au niveau de la maquette (pas très réussie de toute façon) : on remarque de suite que Bob Fish a dû prendre un bon coup de soleil entre les deux éditions : un coup du célèbre Magenta certainement ?…
Les titres placés dans le corps de l'immeuble à gauche passent d'un bel orange complémentaire au vert à un simple blanc.
Le logo CHALAND voit apparaître un magnifique "ombré"…
Ce vert particulier et ces codes couleurs étaient souvent visibles en graphisme dans les années quatre-vingt-dix (nonantes) et viennent souvent des sites internet qui commençaient à pulluler dans ces années là : in memoriam pour les start up qui ont engouffré tant de millions des investisseurs au nez fin…
Personnellement je trouve ce choix pas terriblement bien senti : aucune ambiance polar, là où un beau bleu nuit, comme l'ancienne couverture de Bob Fish, voire un gris-bleu serait d'un bien meilleur effet…
Enfin, pour ce que j'en dis…

Chaland, Intégrale vol. 3 - couverture
Les Humanoides Associés ; 2003
(après ses vacances aux Bahamas)

Pour ce qui concerne juste Captivant dans ces intégrales, Le Noël de Lucia reprend la version des Yeux de la Tête, le papier change et on revient au bon vieux couché mat standard que tous les imprimeurs aiment tant refiler…

Captivant numéro 167 - couverture
in Chaland Intégrale vol. 3 ; 1997
Captivant numéro 381 - couverture
in Chaland Intégrale vol. 3 ; 1997


Sur ces deux couvertures de numéros de Captivant, on distingue la création d'une sorte de joli bandeaux rouge, sur la gauche,  au niveau du "dos" (comme les numéros de Captivant devraient être brochés ce serait au niveau des piques)…

Captivant numéro 381 Pl. 1
in Chaland Intégrale vol. 3 ; 1997
Captivant numéro 381 Pl. 2
in Chaland Intégrale vol. 3 ; 1997
Captivant numéro 381 Pl. 3
in Chaland Intégrale vol. 3 ; 1997

Toujours notre petite scène de cul mais la version du Noël de Lucia ne bouge pas : on garde la lumière éteinte pour la partie de jambes en l'air et Lucia et son génie / bon samaritain…
Pourtant ce n'est vraiment pas la première fois en eux deux !?…

Ce qui est amusant dans ces intégrales est le fait que l'éditeur a cru bon de créer un numéro de Captivant en plus : un moyen d'intégrer quelques histoires qui traînaient dans Métal Hurlant et qui n'avaient pas encore été publiées en livre comme Neige Rouge (in Metal Hurlant numéro 70 de décembre 1981).
L'idée eût pu être bonne mais avec plus de bon sens que de véritable réflexion : la couverture des deux éditions de 1979 & 1987 sert pour ce numéro "inédit" de Captivant : numéro 389 du 25 septembre 1954.
La véritable bonne idée eut été de le placer à la bonne place : après le numéro 387 !
Ne serait-ce que parce que cela correspond à une annonce intérieure dans ce numéro 387 : sur le personnage de scout revenant la semaine suivante, mais, surtout, parce que il est plus cohérent que Le retour de Gégène (l'histoire la plus intéressante qui restait inédite en livre) se trouve après les autres histoires de Gégène !

Captivant numéro 387 - couverture originale
Collection privée

Cela aurait fait une véritable bonne surprise aux lecteurs, nouveaux ou anciens, de Captivant : un numéro inséré sur lequel on tombe en lisant le livre…
Ooooh ! Surprise…
Quitte d'ailleurs à plus communiquer sur le fait que les Intégrales présentent du "matériel" inédit, resté soit dans les pages de Métal Hurlant soit repris dans Les années Métal édité par Champaka en 1997…
Dans la mesure où Captivant était fait par Chaland ET Cornillon, il eut été normal que ce nouveau numéro comporte un peu plus de pages de Cornillon  : il en reste quelques unes dans les pages de certains Métal Hurlant…
Plutôt que mettre cette bande détournée sur le film Furyo, chronique venant de Starfix d'ailleurs…
Il reste des strips de Roger Bonnet inédits dans des numéros de Métal Hurlant, pas tous présents dans Captivant : je me demande pourquoi ils n'ont pas trouvé leur place dans ce nouveau numéro ?


Captivant numéro 389 - couverture
in Chaland Intégrale vol. 3 ; 1997

Pour finir, deux versions d'une page annonce commerciale passée dans Métal Hurlant numéro 27 de mars 1978 et qui se retrouve en couleurs dans Captivant
Vous trouverez cette version couleurs dans l'une ou l'autre des éditions présentées et pourrez comparer par vous-même l'excellent travail de mise en couleurs qui nous laisse croire à une vraie publicité dans années 50 pour des personnages tel Jean Valhardi

Ce sera Captivant !

Jack Peterson © Chaland
in Métal Hurlant numéro 27

Jack Peterson © Chaland
Bleu pour la mise en couleurs







Valéry Ponzone



PS : Si vous voulez vraiment — mais vraiment — rigoler un bon coup, il suffit de passer ce texte en traduction offerte par Google Translate (à droite il y a un menu déroulant avec différentes langues) en Anglais for example : Yves Chaland devient Yves Barge…
Ouaips : c'est vraiment barge.
Mais c'est super drôle à lire.
Si Google Translate avait existé plus tôt, André Breton n'aurait rien créé du tout et serait resté dormir dans sa chambre d'hôtel de la Place du Panthéon !

mardi 21 janvier 2014

> Yves Chaland - Le Jeune Albert à Bruxelles, sur son mur peint était perché…

Puisque j'en parle, autant le montrer…
Bruxelles décembre 2010.
En descendant la rue des Bogards à Bruxelles (ou à en la remontant : tout est fonction du point de vue…) à l'angle de cette rue et de la rue des Alexiens se trouve le mur peint en hommage à Yves Chaland : Le Jeune Albert à l'arrêt du tram…
Au-dessus d'une sorte de dépôt d'ordure, un petit espace laissé à l'abandon, qui pourrait faire un mini square s'il était aménagé, à côté d'énormes poubelles…
Le voici.
Je n'ai pas retouché la photo pour donner l'impression que le ciel est bleu et que les petits oiseaux virevoltent dans le ciel bruxellois : c'est du brut.
Je ne sais pas trop s'il faut se réjouir tant que cela de l'emplacement de ce mur Jeune Albert ?
Drôle d'hommage, et, pourtant, la fresque est très belle !

© Chaland / Beaumenay-Joannet


Ce qui est amusant, c'est que si l'on continue à descendre la rue (pour le coup dans l'autre sens ça ne marche pas) on tombe sur un autre mur peint celui de Monsieur Jean à Bruxelles des Dupuy-Berbérian…
C'est amusant parce qu'ils se connaissaient : si le mur avait été celui de Cubitus je n'aurais pas fait de lien particulier entre les deux !…


© Dupuy - Berberian


Cela dit, allez à Bruxelles faire un tour, plus pour la ville qui est très agréable, que juste pour ses murs peints…
Et marcher dans Bruxelles, tomber au hasard d'un rue sur l'un de ces murs peint est toujours très amusant pour celles et ceux qui s'intéressent à la BD : c'est gai !

lundi 20 janvier 2014

> Avril et Corbasson - Exposition octobre 2013 - Bruxelles Galerie Petits Papiers

Octobre 2013.
En poussette dans les rues de Bruxelles sous le quartier du Sablon.
Nous traversons et croisons la trajectoire de François Avril et Dominique Corbasson à l'angle du Bd de l'Empereur et la rue des Bogards (entre le siège du PS et le mur peint de Chaland Le Jeune Albert pour situer) , qu'ils descendent d'un pas alerte…
Des années que nous ne sommes vus et nous nous tombons dans les bras : quelle surprise !!
Le Monde est vraiment petit…
En y repensant, il nous réserve avec son allié le hasard de bien belles surprises : être dans une capitale d'un autre pays, et croiser ainsi le chemin de gens que l'on aime et apprécie…
J'apprends qu'une exposition du couple a lieu au même moment à la (très belle et très grande) Galerie Petits Papiers du Sablon…

Nous allons y faire un tour le lendemain : quelques photos du polyptyque Victoria Street et de la salle du sous-sol…
C'est splendide ! Tout simplement
L'émotion des retrouvailles m'a fait oublier que j'avais sorti mon truc-machin-phone et pris quelques "clichés"… que je viens de retrouver.
Désolé mais un smartphone n'est vraiment pas ce qu'il y a de mieux au niveau rendu, mais le seul moyen dans ma poche de garder quelques images de cette très belle exposition…

© Avril

© Avril

© Avril

© Avril

© Avril et Corbasson


© Avril

© Avril

dimanche 19 janvier 2014

> Yves Chaland et le supersonique F-52 : un portfolio avec une histoire… bien morale !

Le portfolio F-52 est sorti en 1986 des presses du sérigraphe Anagraphis qui l'a imprimé pour le compte des Éditions Déesse…
Pour cet éditeur, Yves Chaland avait déjà fait un dessin pour un portfolio collectif, en compagnie d'auteurs français et anglo-saxons : WFCBA ainsi que l'estampe It's Alive pour l'anniversaire des mêmes Éditions Déesse !…
D'un format 30 x 40 cm, à l'horizontale (je ne pense pas que l'on puisse parler de format à l'italienne, la chemise s'ouvrant par le haut, et non pas pas sur le côté comme un livre à l'italienne?), l'intégralité des planches intérieures et la chemise servant de "reliure" ont été imprimées en sérigraphie :
- 3 passages couleurs dont une "basée" afin d'obtenir par superposition la quatrième couleur pour l'intérieur, sur un papier Vélin d'Arches 270 grammes  ;
- 4 passages couleurs pour l'image de la couverture, imprimée sur une carte bleue, avec marquage et rabats, de 350 grammes environ ;
Pour un tirage global de 1049 exemplaires (dont 50 exemplaires hors commerce), tous signés et numérotés par l'artiste sur un double feuille sur papier calque reprenant le découpe technique du F-52…

Comme l'explique le calque supplémentaire servant de justificatif de tirage et  montrant le plan en découpe de l'avion supersonique, le F-52 est un avion de transport géant et aurait pour ambition de faire entrer l'industrie aéronautique dans l'avenir…

Ce qui caractérise les estampes ou les portfolios de Chaland est le fait que la plupart du temps ces images racontaient quelque chose, une histoire.
Ce portfolio n'est pas un assemblage de beaux dessins en impression d'art, et numérotés et signés, mais nous fait découvrir une histoire que l'on découvre au fil des planches…

Chaland ne se limitait jamais à pas de simples belles images éditées en sérigraphie, mais allait bien au-delà…



F-52 - Portfolio - couverture
Le supersonique a pris son envol avec ses passagers à bord et survole la côte…

F-52 - Portfolio - planche 1
Les passagers prennent possession des lieux et entrent dans l'avion de transport géant F-52 par le hall d'accès.
Certains sont déjà installés dans le salon à gauche,
Un stewart distribue des revues : nous sommes au niveau des 1ères classes.
Il faut regarder au 1er rang des passagers qui entrent, légèrement sur la droite du dessin : le couple à côté de l'hôtesse.
La femme tient le bras d'un homme, certainement son mari à l'air débonnaire mais elle regarde déjà légèrement
en arrière…
Un autre passager en retrait : celui avec des lunettes, qui porte son manteau posé sur les épaules…
Le classique triangle est en place : Jamais deux sans trois

F-52 - Portfolio - planche 2
Compartiments de 1ère classe dans la partie supérieure de la planche.
Certainement les 2èmes classes en dessous : les gens paraissent si triviaux et beaucoup plus "relâchés" :
un homme urine devant nous, une femme téléphone en tenue légère, et ce, sans aucune pudeur pour la personne
qui regarde ce portfolio…
Revenons aux classes supérieures et à la 1ère classe : ce qui s'y passe est nettement plus agréable à regarder.
Tout un petit monde de Seigneurs en pleine activité.
Tiens, tiens : nous retrouvons nos trois protagonistes dans le compartiment central : le mari semble satisfait de lui,
toujours son air débonnaire et replet.
Mais sa femme, sa femme… Elle aguiche son voisin d'en face plongé dans un livre, lui adresse un clin d'œil
bien appuyé tout en lui faisant du pied…

F-52 - Portfolio - planche 3
La salle à manger pour les 1ères classes : entre club de jazz et cabaret.
Contraste saisissant avec vue du "pont" inférieur ce qui est le grand salon de 3ème classe : pas la même classe, effectivement…
Un petit monde pas très reluisant, le côté plébéien…
Mais c'est dans la salle à manger que semble se jouer les choses : le mari est toujours attablé, tout à sa mastication,
toujours aussi satisfait de la vie, semble-t-il…
Pendant ce temps sa femme et leur voisin de compartiment ont franchi un palier : l'homme embrasse sa cavalière
sur la piste de danse et, ce, devant tout le monde !…

F-52 - Portfolio - planche 4
La salle de projection pour les 1ères classes  : le mari fait le guignol devant l'écran sur lequel le film est projeté :
il amuse la galerie… Je suis prêt à parier que Chaland a dessinée une scène d'un vrai film, avec un sujet proche…
Une forme de mise en abyme. En tout cas que voyons-nous sur l'écran ? Une femme et deux hommes…
Mais quel film ? Le mystère reste entier…
Les autres passagers rient de bon cœur… pendant que madame s'amuse !
L'autre passager va plus loin dans leur flirt : le baiser est plus passionné, il en a fait tomber ses lunettes
qui se trouvent à ses pieds…
La salle de projection se trouve au-dessus des cuisines dans l'agencementdu F-52 : le commissaire de bord est appelé
par l'un des cuisiniers, qui lui montre la taille de quelque chose : on se rend compte qu'il manque
un des couteaux rangést au râtelier, là bas sur la gauche, au fond…
Et pas le plus petit !

F-52 - Portfolio - planche 5
Le bar des 1ères classes : le mari blague et raconte certainement des histoires désopilantes à ses compagnons de classe
et de voyage…
Il continue à bien amuser la galerie présente dans le petit bar.
Pendant qu'il fait son intéressant sa femme et sa nouvelle conquête se sont éclipsés : on les voit à l'étage inférieur
traversant le grand bar.
Nul doute que l'homme va conclure et que la luxure va prendre le dessus sur la fidélité matrimoniale !!…

F-52 - Portfolio - planche 6 et dernière planche
La partie des couchettes des 1ères classes : le commissaire de bord est à nouveau appelé par l'un des stewarts :
l'une des couchettes est sens dessus-dessous…
L'échelle qui monte à celle d'au-dessus déplacée et du sang macule murs et sol…
Les traces de sang nous amènent au niveau inférieur, dans la soute à bagages, près des trains d'atterrissage du F-52 :
une caisse ouverte, le mari fatigué mais content de lui !
Il a en effet découpé sa femme et son amant (supersonique) et rangé le tout dans la caisse de … corned-beef.
Ouf !… L'honneur est sauf et la morale du mariage préservé !!

Si le F-52 est l'avion du futur, ce qui s'y déroule n'y est que très classique… 

Voilà la petite histoire que je raconte aux personnes à qui je montre le portfolio à la librairie les fois où la conjonction portfolio disponible en fonds et client intéressé se présente…
Évidemment ce portfolio n'est pas si courant que cela…

F-52 a été repris dans un beau livre édité par Champaka en 1995 : Chaland illustrateur.
En 1 couleur… rouge plus trait noir.
Je ne sais pas pourquoi ce choix a été fait puisque le livre était en quadrichromie…
Peut-être pour des raisons économiques ?…
Même s'il est évident que ce portfolio est finalement tragique et sanglant, donc rouge comme le sang qui gicle à la fin, il est dommage que le lecteur, n'ayant pas forcément le portfolio, ne puisse pas le voir dans sa version originelle…

Le F-52 a été récupéré par Chaland : il aurait dû servir d'avion dans lequel se serait déroulé une aventure de Spirou et Fantasio, si les éditions Dupuis le lui avait permis : Spirou aurait troqué son costume de groom pour celui de stewart
Ce rôle a été offert par la suite à Freddy Lombard et sa clique dans l'album Freddy Lombard, F-52 : puisque toute l'action se déroule dans ce superbe avion de transport géant.
Cette histoire est certainement l'une des plus touchantes parmi celles de Freddy Lombard écrites par Chaland et Yann : les personnages prenaient une toute autre dimension depuis La comète de Carthage et Vacances à Budapest (la toile de fond de l'insurrection hongroise de 1956 place tout de suite cette bande de dilettantes, financée par les mandats de l'oncle australien de Freddy Lombard, dans un contexte historico-politique très rare dans la bande dessinée francophone)…
Décoller dans le F-52 leur permettrait certainement de prendre — enfin — leur envol vers d'autres destinations encore plus stupéfiantes et déroutantes pour les lecteurs…


Freddy Lombard, F-52 - couverture
Première édition ; Les Humanoïdes Associés 1989


Freddy Lombard, F-52 - projet de couverture
© Chaland / Beaumenay-Joannet

J'ai eu la chance d'exposer l'intégralité des planches de ce portfolio en 1997, parmi toute les planches de La comète de Carthage, de Spirou, certains originaux d'estampes ou l'autre portfolio de Chaland,
Cauchemars
Un très grand souvenir : tout était magnifique! …

Ce portfolio à sa sortie devait valoir 350 FF de jadis
J'ai acheté mon exemplaire à sa sortie directement chez Déesse Diffusion où travaillait un ami, dans leur local situé rue des Bernardins dans le 5e arrondissement parisien. Claude Soulard en était le gérant : quelqu'un que j'appréciais beaucoup et qui m'a beaucoup appris au fil des années en discutant souvent très longtemps ensemble… Par la suite Déesse Diffusion est devenu un de mes principaux fournisseurs (principalement d'import US) mais j'ai aussi récupéré fin des années 80/début des années 90 le reste du stock de ce portfolio qu'il leur restait en faible quantité…
J'ai pu en repasser à des amis, et j'ai aussi bien fourni deux librairies parisiennes à cette époque : Fantasmagories et Super Héros.
Ce portfolio F-52, mais aussi Cauchemars du même Chaland…
Quelques années plus tard, vers 1996, c'est la Librairie Déesse qui a retrouvé les reliquats de planches ou calques imprimées (rien n'est jamais imprimé à l'unité près en tirage d'Art : certaines planches peuvent être en nombre légèrement plus important et servent éventuellement à remplacer une planche défectueuse non triée et éliminée par le sérigraphe) : son gérant m'a proposé de récupérer tout cela.
Permettant ainsi à certaines personnes d'acheteur l'une ou l'autre planche seule à moindre prix : parfois il  n'est pas possible à certains de se payer ce genre de portfolio relativement cher, ce qui est plus que compréhensible, et avoir une seule planche permet tout de même de se faire plaisir !

Pour terminer : la source d'inspiration de Chaland pour réaliser ce portfolio : un numéro de Science et Vie Spécial Aviation 1949.
Mais cela, vous deviez déjà le savoir n'est-ce pas ?…

Je ne peux que vous souhaiter un bon vol à bord du F-52… si vous arrivez à l'attrapez !!…

© Science et Vie





Valéry Ponzone



Tous les dessins sont © Chaland / Beaumenay-Joannet, Déesse & mézigue pour les scans et le reste